Lorsque j’ai pénétré le monde de l’Amoureux, je me suis sentie très gaie, avec l’impatience qu’on ressent quand on attend quelqu’un qu’on aime, quasi les papillons dans le ventre. J’étais dans un paysage léger et fleuri, je regardais autour de moi avec un grand sourire, des yeux, je cherchais qui me procurait ces sensations agréables.
C’est alors que les Amoureux sont passés devant moi. Il y avait le beau jeune homme aux cheveux parfaitement brushés, le beau gosse plein de prestance, avec tout l’attirail qui va avec, les fringues, les lunettes de soleil (la classe quoi).
Il était accompagné d’une jolie jeune blonde bronzée et mince comme une poupée Barbie, maquillée et délicatement parfumée, ornée de bijoux très fins. Elle battait des cils en se donnant des airs de petite fille. Ils marchaient côte à côté en se jetant des oeillades pleines de sous-entendu. Tantôt on faisait une petite moue, tantôt on se lançait des grands sourires Colgate avec une rose entre les dents.
La conversation allait bon train. Ils étaient beaux, légers, aériens… on était en pleine séance de séduction glamour-sexy comme dans les films. L’attirance était palpable, à couper au couteau. Comment pourraient-ils résister à ça? Ils vont s’embrasser d’un moment à l’autre et on entend déjà les violons et tout l’orchestre, avec un feu d’artifice en toile de fond mais ! voilà pas qu’un troisième personnage entre en scène, c’est une dame élégante, certes très belle aussi mais dans un style plus austère et elle n’a pas l’air contente du tout.
Les violons se rayent, l’orchestre s’arrête maladroitement de jouer.
Elle saisit l’Amoureux par l’épaule et lui dit:
-Dis-donc, t’aurais pas oublié quelque chose toi?
Barbie est stupéfiée, elle a un mouvement de recul en pensant: -“Quoi? Ken a une autre femme dans sa vie?” Mais Ken tente de récupérer l’affaire et s’écrie (bien qu’avec peu de conviction)
– Hey, qui voilà… heuu… salut, Josette, tiens tu tombes bien je pensais te présenter Barbie heuu je t’ai déjà parlé de Barbie, tu te souviens? Tiens Barbie, je te présente Josette.
Cupidon se marre comme un dératé en les observant. Il se dit: “Quelle inconstance ! Que cet Amoureux est faible et influençable… une vraie marionnette, j’en fais tout ce que je veux.”
L’Amoureux nous rappelle tout ce que la passion, aussi belle soit-elle, peut avoir de décevant et d’instable. On est dans le superficiel et les apparences, au fond, l’Amoureux est un indécis. Futile, insolent, badin, léger, il est aussi inquiétant car il tourne comme une girouette.